L'entreprise Lubrizol a fait une déclaration préalable au printemps 2017 pour construire un fumoir extérieur non clos dans l'enceinte de l'usine Seveso seuil haut, a révélé Konbini News (ci-dessous) ce mardi 8 octobre. Ce fumoir se situait sur le toit d'un bâtiment à une vingtaine de mètres du principal entrepôt parti en fumée lors de l'incendie du 26 septembre dernier. Comble de l'ironie, ce fumoir a été créé à proximité immédiate du bâtiment du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de l'établissement.
Le projet avait reçu un avis favorable de la Ville de Rouen, qui détient la compétence en matière d'urbanisme, mais aussi des services de l'État. Ceux-ci sont compétents en matière de sécurité industrielle et de réglementation du travail. L'inspection des installations classées a ainsi donné son feu vert. Le projet n'a pas non plus suscité d'opposition de la part du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) ni de l'inspection du travail, qui avaient tous deux donné un avis favorable.
Salles closes équipées d'un dispositif d'extraction
Pourtant, l'implantation d'un fumoir à l'air libre ne respecte pas la réglementation en vigueur, a fortiori dans un établissement classé Seveso seuil haut. Les entreprises peuvent mettre à disposition des lieux dédiés aux fumeurs dans leur enceinte. Mais selon l'article R. 3512-4 du Code de la santé publique (1) , ces lieux doivent être des salles closes équipées d'un dispositif d'extraction d'air et de fermetures automatiques « sans possibilités d'ouverture non intentionnelle ». L'article R. 4227-23 du Code du travail (2) interdit également de fumer dans les emplacements situés à l'air libre où sont entreposés des matières explosives et inflammables.
Aucun lien n'est établi, en l'état actuel des connaissances, entre ce fumoir et le départ d'incendie de l'usine, alors que les enquêtes administrative et judiciaire en cours n'ont pas encore livré leurs conclusions. Le parquet de Paris, qui s'est saisi de l'enquête ouverte par le parquet de Rouen le 26 septembre, a précisé ce mardi 8 octobre qu'elle n'avait pas permis à ce jour de déterminer les causes de l'incendie ni de localiser avec certitude l'origine du sinistre.
Durant ce dernier, plus de 5 000 tonnes de produits dangereux situées dans l'enceinte de l'établissement Lubrizol sont parties en fumée. La préfecture a révélé le 4 octobre qu'une grosse partie des 9 000 tonnes de produits stockées dans l'entreprise mitoyenne Normandie Logistique avait également flambé dans l'incendie.
Nous avons la preuve qu'un fumoir non clos était installé sur le site de l'usine Lubrizol, près du bâtiment principal qui a brûlé.
"Une véritable aberration", selon un consultant ayant travaillé pour l'entreprise de produits chimiques. pic.twitter.com/W5ekomkuHS
— Konbini news (@konbininews) 8 octobre 2019