Robots
Cookies

Préférences Cookies

Nous utilisons des cookies sur notre site. Certains sont essentiels, d'autres nous aident à améliorer le service rendu.
En savoir plus  ›
Actu-Environnement

Pollution de l'air : la Cour des comptes critique l'incohérence des politiques publiques

La lutte contre la pollution de l'air est incohérente. Trois axes d'amélioration sont proposés : miser sur des stratégies locales, appliquer le principe "pollueur-payeur" et coordonner les politiques climat et lutte contre la pollution de l'air.

Gouvernance  |    |  P. Collet
Pollution de l'air : la Cour des comptes critique l'incohérence des politiques publiques
Environnement & Technique N°356
Cet article a été publié dans Environnement & Technique N°356
[ Acheter ce numéro - S'abonner à la revue - Mon espace abonné ]

La lutte contre la pollution de l'air "n'est pas encore une priorité nationale, sauf en cas de pics", critique la Cour des comptes, qui pointe "les incohérences entre les objectifs de cette politique et ceux poursuivis dans d'autres secteurs". Ce constat accablant se base sur des incohérences entre les actions locales et nationales, l'absence de continuité dans les plans mis en œuvre, la diversité des outils utilisés, et le manque d'évaluation des actions et de suivi des données financières. Les pics de pollution "sont (…) l'illustration des difficultés de la lutte contre la pollution de l'air : les chevauchements de compétences entre niveaux décisionnels sont parfois importants et les actions visent le plus souvent à agir sur des secteurs (industrie et transports) qui ne sont pas nécessairement les plus pollueurs", résume la Cour.

Telles sont les principales conclusions d'un rapport (1) publié jeudi 21 janvier. Outre un meilleur suivi et une meilleure évaluation des politiques publiques la Cour juge "urgent" de définir "une politique claire et ambitieuse, inscrite dans la durée". Pour y parvenir, trois priorités sont mises en avant : fixer un cadre national clair et proposer des outils tout en laissant aux collectivités le choix des stratégies locales permettant d'atteindre les objectifs, mieux appliquer le principe constitutionnel "pollueur-payeur" et mettre en cohérence les politiques de lutte contre la pollution de l'air et de réduction des émissions de CO2.

Une situation particulièrement défavorable

Certes, depuis 1996, la pollution de l'air est mesurée en France sous l'impulsion européenne. Certes, certaines mesures dans le domaine des transports, de l'industrie et de la production d'énergie ont porté leurs fruits et le niveau des émissions de polluants a baissé globalement au cours des vingt dernières années. Pour autant, "il reste encore de trop nombreux points du territoire où les niveaux de pollution sont durablement plus élevés que les valeurs réglementaires". Cette situation ne satisfait pas la Cour qui rappelle qu'"il est désormais établi" que la pollution de fond supportée au quotidien est plus néfaste en terme de santé que celle constatée lors des pics de pollution. Pire, "les seuils réglementaires déclenchant l'action publique en cas de pic de pollution sont au-dessus des normes recommandées par l'organisation mondiale de la santé (OMS)".

La litanie des critiques ne s'arrête pas là. La Cour dénonce pêle-mêle un manque d'évaluation a posteriori du rapport coût/bénéfice des actions, une absence de concrétisation de mesures maintes fois annoncées, la faiblesse des bases scientifiques des mesures proposées, le flou qui entoure les financements dédiés au sujet, ou encore le peu de stabilité de la gouvernance d'ensemble. La Cour juge la situation "d'autant moins favorable" que l'Union européenne entend relever les objectifs de réduction de la pollution d'ici 2030. "Or, en matière de lutte contre la pollution les résultats ne peuvent être obtenus qu'à long terme, et 2030 est, de ce fait, un horizon proche", souligne-t-elle.

Le financement des AASQA malmené

Ce vendredi, la fédération Atmo France qui regroupe les AASQA a fait le point sur les financements des organismes chargés du contrôle de la qualité de l'air. Soixante millions d'euros y sont consacrés chaque année, dont 10 millions au titre des investissements.
"Il se compose de trois tiers très variables" a expliqué, Guy Bergé, trésorier d'Atmo France, détaillant l'évolution entre 2012 et 2015. La part de l'Etat, en légère baisse de 3%, est passée de 33 à 32%, celle des collectivités territoriales, de 27 à 25%, et celle des industriels, de 36 à 44%.
Par ailleurs, les financements des collectivités et des industriels n'étant pas obligatoires, les ressources ne sont pas prévisibles. Un vrai problème pour des organismes qui doivent répondre à de nouvelles missions, telles que le suivi des pesticides. Pour pérenniser leurs moyens les AASQA souhaiteraient bénéficier d'une part de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TIPCE).
Actions locales et fiscalité

Constatant que les mesures à mettre en œuvre sont locales, le rapport préconise que "l'État fixe un cadre clair et donne des outils spécifiques mais qu'il laisse ensuite les acteurs locaux prendre les mesures les mieux adaptées aux situations rencontrées". Cela passe notamment par la mise en cohérence des calendriers des plans nationaux, des schémas régionaux et des plans locaux de lutte contre la pollution de l'air. L'objectif est ici de mieux définir le cadre de l'action locale. Du côté des outils, la Cour demande que soient "identifiés par une pastille les véhicules selon leurs émissions de polluants, afin de pouvoir mettre en place rapidement des mesures de restriction de circulation". La mesure devrait aboutir, puisque le futur dispositif est actuellement en consultation.

Par ailleurs, "il est regrettable que le principe constitutionnel « pollueur-payeur » ne s'applique que de manière très limitée et concerne surtout l'industrie", déplore la Cour, soulignant que l'agriculture et le résidentiel tertiaire y échappent totalement et les transports en partie. Pourtant, au-delà de la réduction attendue de la pollution, le principe permettrait la participation de tous les secteurs au financement de la lutte. Afin d'impliquer tous les secteurs émetteurs de pollution atmosphérique, la Cour suggère de mettre en œuvre un financement du réseau de surveillance de la qualité de l'air conforme au principe pollueur-payeur pour tous les secteurs économiques. Cette mesure est réclamée de longue date par les associations agréées pour la surveillance de la qualité de l'air (AASQA) qui s'inquiètent pour leur financement (voir encadré). Une application concrète du principe pourrait être "[une révision des] taux de la taxe spéciale sur certains véhicules routiers afin de mieux prendre en compte l'impact des émissions des poids lourds sur la pollution de l'air". Cela compenserait la disparition de l'écotaxe, souligne la Cour.

Enfin, la Cour note la complexité d'articuler la lutte contre la pollution atmosphérique et celle contre les changements climatiques. D'autant que "la lutte contre le réchauffement climatique et les émissions de CO2a brouillé en partie la communication institutionnelle sur la pollution de l'air". Il y a "urgence" à y remédier et "les outils mis en place pour diminuer l'émission de CO2 ne doivent plus entraîner de fait l'émission accrue d'autres polluants". Et de rappeler, entre autres, que si les émissions moyennes de CO2 de voitures neuves vendues en France ont chuté de 149 à 117 grammes par kilomètre entre 2007 et 2013, "le bonus-malus a favorisé, au moins dans ses deux premières années, la diésélisation du parc automobile". Concrètement, la Cour propose une mesure demandée de longue date par de nombreux acteurs de la lutte contre la pollution de l'air : "taxer le gazole et l'essence en fonction de leurs externalités négatives respectives (polluants atmosphériques et gaz à effet de serre), afin de rééquilibrer la fiscalité pesant sur ces deux carburants".

1. Consulter le document.
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-26093-rapport-cour-des-comptes-pollution-air.pdf

Réactions2 réactions à cet article

Pendant ce temps les politiques ,maires et députés de tous partis, de la région de St-Etienne /Loire, persistent à vouloir lancer une autoroute entre St-E. et Lyon alors qu'il en existe déjà une !

sirius | 25 janvier 2016 à 11h58 Signaler un contenu inapproprié

Le droit à un air sain, un droit fondamental non négociable !
L’Etat doit protéger les citoyens.
Urgence sanitaire sans frontière.
France le parc voiture: 60 % Diesel. Stop !

ActiVE | 15 mars 2016 à 11h48 Signaler un contenu inapproprié

Réagissez ou posez une question au journaliste Philippe Collet

Les réactions aux articles sont réservées aux lecteurs :
- titulaires d'un abonnement (Abonnez-vous)
- inscrits à la newsletter (Inscrivez-vous)
1500 caractères maximum
Je veux retrouver mon mot de passe
Tous les champs sont obligatoires

Partager